Sassou a révisé la constitution, mais qu’est ce qui change?

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Fondamentalement RIEN, sauf la durée de l’état d’urgence !Dans le feu de l’annonce par le gouvernement de son initiative de réviser la constitution, l’opinion s’est aussitôt rétractée.

À raison, parce que l’histoire récente du Congo contient de très mauvais souvenirs dans cette affaire de toucher à la Constitution: des décès, des arrestations et des disparitions. Des violences et des menaces politiques. Et comme par hasard, le gouvernement, les partis politiques, la société civile et la confrérie des juristes n’ont pas suffisamment apporté de la lumière, permettant au peuple obscurci d’aller de sa propre interprétation. Beaucoup de spéculations, notamment en ce qui concerne l’accession au pouvoir.

Et pourtant, il n’en est rien ! Le vote qui a eu lieu ce vendredi au parlement peut s’apparenter à un simple amendement, si nous étions aux États-Unis. Cela veut dire quoi concrètement ? Tout le bloc de la Constitution du 25 octobre 2015 reste en place. Rien n’a changé. Tous les articles sont en place tel qu’adoptés lors du référendum d’il y a bientôt six ans. Pas un seul n’a été retranché ni ajouté.

Mais attention ! Ce qui change, c’est seulement LA DURÉE DE L’ÉTAT D’URGENCE OU DE L’ÉTAT DE SIÈGE QUI PASSE DÉSORMAIS DE 20 À 90 JOURS. Il n’y a que CELA. Et rien d’autre ! C’est une partie de l’article 157. Le nombre de mandats au pouvoir, comment y accéder, le mode d’élection du président de la République ou des députés et des sénateurs, rien, mais alors RIEN n’a été bousculé. Tout est en place comme en octobre 2015.

Alors, des leçons à tirer de cet exercice de révision ? Il y en a plein. La classe politique doit en prendre conscience. Premièrement, le peuple n’a pas été associé au processus à travers les canaux traditionnels tel que le porte-parole du gouvernement, les partis politiques, la société civile et la société savante (juristes).

Une simple annonce en conseil des ministres n’a pas suffit. Par stratégie, le gouvernement a certainement voulu ainsi, mais la démarche, loin de convaincre le peuple entier, a plutôt provoqué les incertitudes, les peurs et les stress. Deuxièmement, c’est qu’il faut faire évoluer les lois internes. Plusieurs codes en usage au Congo remontent de l’époque coloniale. Il n’est pas étonnant que les tortionnaires du Viaduc de Kintele soient simplement poursuivis pour « Coups et blessures volontaires ». Et non directement pour meurtre, par exemple.

Troisièmement, il faut noter politiquement, que cette révision, bénigne, peut être considérée comme un ballon de sonde. C’est pour tester si par le moyen de la révision de la Constitution, de grandes réformes politiques liées à l’accession au pouvoir peuvent être menées. C’est un test réussi, et la tentation pourra être grande dans l’avenir. Mais pour l’instant, plus de peur que de mal, circulez, il n’y a rien à voir !

@Arsene SEVERIN