Haïti: la demande d’intervention d’une force étrangère ne fait pas l’unanimité

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Plongé dans une insécurité intenable où les gangs armés bloquent le terminal de Vareux où sont stockés 70% du pétrole du pays, Haïti est complètement paralysé. Et le choléra fait sa réapparition. Face à cette situation, le gouvernement haïtien sollicite le déploiement immédiat d’une force spécialisée, armée, « pour faciliter la distribution du carburant, stopper sur toute l’étendue du territoire la crise humanitaire, causée entre autres par l’insécurité résultant des actions criminelles des gangs armés et leurs commanditaires ». Un appel relayé dimanche soir par le chef de l’ONU Antonio Guterres. Mais cette décision est qualifiée de haute trahison à la souveraineté nationale par beaucoup d’Haïtiens.

Au regard de l’article 263-1 de la Constitution de 1987, cette décision est inconstitutionnelle, selon Jaccene Jacques, bâtonnier de l’ordre des avocats des Gonaïves, rapporte notre correspondant aux Gonaïves,Ronel Paul. Il condamne le gouvernement d’Ariel Henry, qui, selon lui, ne fait qu’aggraver la situation du peuple haïtien. « On a eu pas mal de missions en Haïti, Minustah, Minujust, Binuh… Malgré la présence de la communauté internationale à travers ces missions les problèmes perdurent. Les militaires étrangers ne vont pas résoudre le problème haïtien. Au contraire ils vont encore l’aggraver », déplore-t-il.

Conscient que nous sommes arrivés à un point où l’insécurité asphyxie complètement la vie des Haïtiens, l’ancien député Guy Jacob Latortue estime cependant que la situation n’autorise pas Ariel Henry à souiller davantage à la souveraineté de la nation haïtienne. Selon lui les interventions militaires n’ont jamais donné de résultat en Haïti.

Une aide pour consolider le gouvernement ?

« On a fait l’expérience, les Américains sont entrés dans le pays en 1915, analyse-t-il. De 1915 à 1934, ils n’ont rien laissé pour nous. En 1994, sur la demande du président Aristide, nous avons eu encore des militaires en Haïti: des militaires américains, français, canadiens. Ils ont passé un bon bout de temps en Haïti. Ils ont laissé le pays sans avoir rien laissé. On a encore fait l’expérience de en 2004 sous la présidence de Boniface Alexandre, des militaires étaient venus en Haïti, après leur départ le problème d’insécurité existe encore. Il faut chercher à résoudre le problème dans ses racines pas de manière maquillée. »

La demande de cette aide militaire est une façon « voilée » du gouvernement d’Ariel Henry de consolider son pouvoir, selon de nombreux Haïtiens.

Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a réclamé dimanche le déploiement d’une force armée internationale. « Le secrétaire général exhorte la communauté internationale, y compris les membres du Conseil de sécurité, à examiner en urgence la demande du gouvernement haïtien de déployer sans délai une force armée spécialisée internationale pour faire face à la crise humanitaire », a demandé Antonio Guterres dans un communiqué de son porte-parole Stéphane Dujarric.

Le prochain Conseil de sécurité prévu pour débattre de la crise en Haïti est prévu le 21 octobre mais le secrétaire général de l’ONU a d’ores et déjà envoyé dimanche au Conseil « une lettre présentant des options pour un soutien renforcé à la sécurité », conformément à la résolution 2645 adoptée le 15 juillet, a indiqué la même source. Cette résolution a prorogé d’un an le mandat du Bureau intégré des Nations unies en Haïti, une structure qui a remplacé la Mission onusienne de maintien de la paix et qui tente d’aider la police locale.

(Avec AFP)