Brazzaville au bord du précipice

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Une dette de dingues

Anatole Collinet Makosso, le Premier Ministre du Congo-Brazzaville, ne croyait pas si bien dire. Le Congo-Brazzaville, dirigé, entre le velours du gant et le fer de la main, par le khalife d’Oyo, Denis Sassou Nguesso, est en cessation de paiements. Plus qu’un simple incident technique suivant l’entendement de Thierry Moungala, qui cultive l’image du sphinx rassurant, le défaut de paiement du petit pays pétrolier d’Afrique centrale cache bien un vrai déséquilibre des finances  publiques et illustre l’ampleur des dégâts, en dépit de la cinquième revue du Fonds monétaire international (FMI) ponctuée par le versement de 45 millions de dollars, revue qui allait être accompagnée par l’ouverture des vannes financières de la Banque Mondiale, de la Banque africaine de développement (BAD), du Club de Londres, du Club de Paris et de plusieurs autres institutions financières. Il n’en a rien été. Le mal est profond. Le comité de trésorerie a accouché d’une souris.

Est-ce grave, docteur ?

Les indicateurs macroéconomiques sont au rouge. Les finances du Congo-Brazzaville sont exsangues.

Depuis quelques temps, le Congo-Brazzaville ne compte que sur le marché des titres publics de la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (Beac) où, selon les derniers chiffres, le Congo-Brazzaville est le premier pays le plus endetté de la zone Cemac, avec un peu moins de 2500 milliards de fcfa, quasiment le budget du Congo-Brazzaville en 2024. Pour faire face aux besoins de trésorerie, le nouvel argentier congolais, Jean- Baptiste Ondaye, s’appuie sur son propre cadet, Ludovic Ngatsé, homme de main, pompeusement appelé « vice- ministre des finances », pour mener à bien les opérations sur ce marché, alors qu’il aurait pu lui même prendre langue avec les banquiers sans utiliser les services d’un intermédiaire…

Trois émissions de titres seraient en cours d’émission pour faire face aux besoins de trésorerie, mais elles auraient de la peine à aboutir, comme le Congo-Brazzaville accuse des défauts de paiement,il serait exclu momentanément du marché ( !!!!!Alphonse Ndongo, sacer info.com, 28 septembre 2024).

Signature

Jean-Baptiste Ondaye et Ludovic Ngatsé ne parviennent pas à renflouer les caisses du trésor public tenu par l’inamovible Albert Ngondo. Les arriérés s’accumulent. Les préavis de grève s’enchaînent.

La dette du Congo-Brazzaville 98 % du PIB est la plus importante de la CEMAC dont le taux d’endettement est fixé à 60 % du PIB . La signature d’emprunteur du Congo-Brazzaville est très dégradée et n’augure pas confiance et la levée des capitaux se réalise à des taux d’intérêt élevés. La dette du Congo-Brazzaville est désormais jugée plus risquée que celle du Cameroun, du Tchad, de la RCA, du Gabon et de la Guinée équatoriale. Après avoir atteint une altitude vertigineuse, les déficits publics du Congo-Brazzaville s’apprêtent à amorcer une entrée des plus brutales dans la zone de turbulence qui se traduit par une faillite de l’Etat. Il y a belle lurette que les finances publiques du Congo-Brazzaville sont sur une pente glissante. Plus que la tendance, c’est le rythme et la vitesse de la dégradation de la situation financière qui interpelle. Comment le Congo-Brazzaville, qui distribuait des pétroCFA à tout-va, en est-il arrivé là ?

Haut vol

Le climat des affaires est maussade. Les investissements se raréfient. La réindustrialisation se fait à pas de loup. Denis Sassou Nguesso, Anatole Collinet Makosso, Jean-Baptiste Ondaye et Ludovic Ngatsé devraient redéfinir les priorités du Congo-Brazzaville, lutter contre la corruption, abandonner le favoritisme, le clanisme, le népotisme, mettre un terme au phénomène des agents fictifs, évaluer l’efficacité des politiques publiques, renoncer à financer certains postes pour mieux investir dans d’autres (éducation, santé, routes, barrages), le tout avec davantage de sens de la repartie. Les recettes d’exportation du Congo-Brazzaville repose essentiellement sur le pétrole à plus de 80 %. Le pétrole a été gagé pour plusieurs années auprès des traders Glencore, Trafigura, Gunvor, Vitol et auprès de la Chine à travers l’opération « matières premières contre infrastructures » encore appelée « route de la soie ». A cela s’ajoute l’évasion financière organisée par les membres du clan Sassou. Conséquence : les recettes publiques sont inférieures aux dépenses. Le produit de la vente du bois et des mines solides prend des directions inconnues.

Entre les traders pétroliers voraces, les courtiers de bois véreux et les trafiquants de mines insatiables qui rôdent autour de Denis Sassou Nguesso, il y a moins de chance que les caisses du trésor public soient remplies à rebord. La faillite est actée, au grand dam des populations du Congo-Brazzaville.


    Benjamin BILOMBOT BITADYS