La BEAC est-elle contrôlée par des lobbys politiques?

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La Beac est-elle devenue plus politique que technique? Les cadres de la Banque centrale à Yaoundé, aux connaissances économiques et financières anciennes, sont-ils branchés au nouveau monde du numérique?

Pourquoi privilégier le cash en billet au détriment du cash numérique? Une valse de questions alimentées par le manque de pertinence de certaines décisions que prend le gouvernorat de cette institution communautaire. À l’observation, depuis le départ des français des sphères de décision de la Banque des banques à Yaoundé, le management de cette institution communautaire reste exposé à des influences politiques.

Le système de gouvernance rotatif, par ordre alphabétique des États membres, en lieu et place d’un appel à candidature qui permet à un cabinet de renommée internationale de dénicher une meilleure intelligence, affaiblit la puissance managériale de la Beac, incapable de jouer son rôle d’émission monétaire depuis 16 ans. La restructuration de la Beac par le FMI, à l’issue du mauvais placement chez Bernard Madoff et une affaire de détournements de fonds au bureau extérieur de Paris ne pourraient expliquer le fait que la Beac n’ait pas joué son rôle d’émission monétaire depuis le 29 mars 2006 dans l’ensemble de la zone. Les pièces de monnaies fabriquées à l’époque, selon nos informations, avaient pris la destination de la RCA, où elles auraient été stockées dans le domicile d’un puissant cadre de la Banque en ce moment-là. L’affaire, connue des cadres de la Beac, aurait été étouffée au nom des arrangements politiques. La rareté des pièces est pourtant criarde dans la zone d’émission.

Comme par simple coïncidence avec la célébration de ses 50 ans, prévue à N’djemana, capitale d’où est originaire Abbas Mahamat Tolli, le gouverneur de la Beac et neveu de feu le président Idriss Deby, la Banque centrale s’apprête à lancer une nouvelle gamme de billets de banque en décembre prochain.

Aussi étonnant que cela puisse paraître, à l’heure où la Reserve Federal (USA), la Banque Centrale Européenne, la Banque Populaire de Chine…, réfléchissent sur l’intégration des blockchains dans le système financier via le cash numérique, et à l’heure de la digitalisation des moyens de payement dans la sous-région Cemac, grâce aux opérateurs de téléphonie mobile, qu’est-ce qui empêche à la Beac booster l’émission de la monnaie électronique pour dynamiser la digitalisation des moyens de paiement?

Cela ne securise t-il pas mieux les transactions financières et commerciales, et aussi la réduction de la dépendance en matière d’impression de billets de banque en France? Des économies à faire.

Comme la politique prime désormais sur l’économie et les finances dans la sous-région, il n’est pas sûr que la République Centrafricaine place son candidat comme futur gouverneur de la Banque, en respect du principe rotatif qui veut que le CENTRAFRIQUE vienne après le Tchad. La France et d’autres États de la sous-région voudraient-ils ainsi punir Bangui pour sa proximité avec la Russie, et également le lancement de « sa » Bitcoin appelée Sango? Si ce calcul politique venait à être validé, c’est Brazzaville qui supplantera le CENTRAFRIQUE en 2024, après le mandat du tchadien Abbas Mahamat Tolli.

A.Ndongo, journaliste économique et financier