Patrimoine : intégrer les langues maternelles dans le processus éducatif

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Célébrée le 21 février, la Journée internationale de la langue maternelle a eu cette année pour thème au Congo « L’éducation multilingue, une nécessité pour transformer l’éducation ». A cette occasion, le ministère de l’Industrie culturelle, touristique, artistique et des Loisirs (Mictal) a initié un temps d’échange et de partage avec les linguistes, enseignants, étudiants et chercheurs.

S’il est vrai qu’outre la langue officielle, le français, les langues maternelles font partie intégrante du quotidien des Congolais, aujourd’hui, de nombreuses études scientifiques, du reste très sérieuses, montrent que l’usage des langues locales dans le système éducatif est très faible. La célébration de la Journée internationale de la langue maternelle, sur le plan national, vise donc à plaider pour cette réalité afin de renverser la tendance et de ce fait, contribuer à la sauvegarde et la promotion des langues nationales.

Pour la ministre de l’Industrie culturelle, touristique, artistique et des Loisirs, Lydie Pongault, parler sa langue maternelle est un signe ostensible de liberté, d’identité et de dignité. A contrario, ne pas connaître sa langue maternelle, ou avoir honte de la pratiquer, est une négation de soi-même, une forme d’aliénation culturelle. Sur le plan éducatif, les langues nationales devraient faciliter les apprentissages, aussi bien dans le cadre de l’enseignement formel que de l’enseignement informel. Le rôle de ces langues devrait être d’autant plus déterminant que l’âge des apprenants serait bas.

Dans le même contexte, Chris Mburu, coordonnateur du Système des Nations unies au Congo, représentant la directrice générale de l’Unesco, a souligné que l’éducation fondée sur la langue maternelle est essentielle pour accompagner un individu vers son plein épanouissement et transmettre les patrimoines linguistiques. « 40 % des élèves dans le monde n’ont pas accès à l’éducation dans la langue qu’ils parlent ou comprennent le mieux. Une telle situation nuit gravement à l’apprentissage, à l’expression culturelle comme à la construction des liens sociaux, et fragilise profondément le patrimoine linguistique de l’humanité. Or, l’usage des langues maternelles dans les systèmes éducatifs pourrait, en effet, faciliter la compréhension des apprenants, et les aider ainsi à réaliser pleinement leur potentiel à l’école », a-t-il fait savoir.

Les adultes appelés à parler les langues maternelles avec les enfants

A cet effet, la ministre de l’Industrie culturelle a indiqué que « la célébration d’aujourd’hui est donc l’occasion de tirer la sonnette d’alarme et d’exhorter les adultes de notre pays à parler les langues maternelles avec leurs enfants. Par la même occasion, les jeunes sont interpellés et invités à parler sans complexe les langues des terroirs de leurs parents, à l’instar de tous les peuples libres de la terre ».

Ainsi, dans cet élan de prise de conscience sur l’importance des langues maternelles et d’encouragement à leur apprentissage et leur utilisation, trois conférences débats étaient au menu de cette célébration initiée par le Mictal. Dans un premier temps, les panélistes ont éclairé le public sur la notion de langue, avant de faire un état des lieux des inventaires linguistiques au plan national ainsi que de présenter les groupes ethniques, sous-groupes ethniques et les communautés linguistiques au Congo.

Dans la suite des échanges, les autres panels ont, entre autres, porté sur la problématique du français comme première langue pour l’enfant congolais ; les causes et conséquences de la maternisation du français au Congo ; la langue comme instrument de domination coloniale ; le diagnostic sur la pratique des langues nationales au Congo par la SIL.

Au nombre des recommandations découlant de ces échanges, on note l’invite à une coopération entre le Mictal et les linguistes en vue de la carthographie actualisée, la sauvegarde, la promotion et la survie du patrimoine linguistique local, ainsi que l’inclusion massive des langues locales dans le système éducatif congolais.

« La célébration de cette journée est capitale car de nos jours, les parents apprennent uniquement le français aux enfants, au détriment de nos langues locales. Ce, dans le but de faciliter leur intégration scolaire. Or, au lieu de se focaliser que sur les langues étrangères, on devrait aussi être fier de nos langues qui ont existé depuis nos origines et qui font notre force », a déclaré Rosny Nkou, étudiant à la Faculté des lettres, arts et sciences humaines de l’Université Marien-Ngouabi.