[Analyse] : Le Congo a besoin des profondes reformes dans tous les secteurs

Le pays s’endort. De Brazzaville, capitale politico-administrative du Congo, Pointe Noire, centre économique principal, des villes secondaires et autres coins et recoins du pays, s’élève des fils et filles du Congo, le même cri. Cri d’alarme, cri de désespoir, cri de cœur, en direction des autorités nationales pour réclamer, en toute légitimité, de meilleures conditions d’existence, aux fins de parer aux maux qui empoisonnent leurs vies et, en conséquence, baisser le taux de mortalité, devenu inquiétant.

Comme, par effet domino, même en sourdine, la grogne, particulièrement, en milieux jeunes, gagne du terrain, sur l’étendue de l’espace national. La toute récente expression de cette grogne a été la revendication publique des jeunes de Mfilou, quartier populaire de Brazzaville. Dans une marche de protestation spontanée, ces jeunes ont brandi un panneau qualifiant l’année 2024, plutôt d’Année de la Souffrance, alors que pour les dirigeants nationaux, cette année a été consacrée à la Jeunesse, donc aux actes visant son épanouissement multiforme et multisectoriel. Signe ouvert d’une insatisfaction matérialisant un front de refus d’une ligne officielle.

Pour la majorité des Congolais, le quotidien est dur. Il est marqué par la précarité. Un état de fait caractérisé surtout par la pauvreté, le chômage, la difficile fourniture en électricité et en eau. S’y ajoutent le manque de soins médicaux adéquats, l’insuffisance de perspectives pour les enfants scolarisés et à la sortie des deux universités du pays.
Et pourtant, au fil du temps, à Brazzaville, dans les murs de l’Hôtel de la Primature, se succèdent les Conseils de Cabinet. Ceux-ci, sous la coordination du Premier Ministre, Chef de Gouvernement, précédant les Conseils des Ministres, au Palais du Peuple que préside le Chef de l’Etat, les mercredis, en semaine. A n’en point douter, de ces deux réunions, au niveau élevé de la République, il en sort des décisions utiles pour la nation. Mais, bien encore insuffisantes pour faire baisser la grogne perceptible dans le pays. Les réussites ne sont pas au rendez-vous, dans la plupart des domaines de la vie nationale. Les autorités ne donneraient pas la preuve ostensible de leur bonne volonté pour installer les mesures de relance.

Les difficultés socio-économiques que connait le Congo renforcent ma conviction que des éléments structurants fondamentaux manquent au pays pour améliorer le pénible habituel des Congolais. Ces éléments structurants sont les réformes. Je l’ai écrit dans  » Ce Jour là en Jeans ». La société congolaise est à réformer en profondeur, et avec elle, les modes de gouvernance du pays. Aucun secteur de la vie culturelle et socio-économique du Congo n’est épargné par la quête des réformes et l’injection d’hommes et de femmes en capacité de faire face aux défis de ces réformes. Un pays se meurt dès lors que ses dirigeants ont du mal à imposer des réformes salutaires, quant bien même leur mise en œuvre ne serait pas aisée.

Ceci dit, des voix s’élèveront, à coup sûr, à la lecture de ces propos que j’écris en homme libre, debout, sain de corps et d’esprit, ayant construit ma vie, au prix de longues années de travail acharné. Des voix s’élèveront pour me renvoyer aux calendes grecques, estimant que sous l’ère du Président Pascal Lissouba où j’en étais co-acteur, aucune avancée n’a été enregistrée dans le pays, celui-ci s’étant enfoncé, entre août 1992 et juin 1997. Supposons qu’il en soit ainsi. Encore que cela reste à vérifier. Ce qui n’exclut pas que les successeurs du mandat du Président Pascal Lissouba soient en obligation morale et politique de rendre heureuses, par leurs pratiques et leur gouvernance de la chose publique, les populations congolaises. Or ce n’est pas le cas.

De la même manière, lorsque des courants de l’opposition et de la société civile congolaises proposent les états généraux de la nation, sorte de dialogue inclusif, pour examiner les maux dont souffre la nation pour y apporter des remèdes efficaces et durables, il leur est débité, en retour, des discours indécents. Soit que les auteurs d’une telle logique travailleraient à une conférence nationale bis pour chambouler le pouvoir en place, en vue de son remplacement. Soit qu’ils tiendraient à se partager des postes ministériels, à l’issue des assises du dialogue, parce qu’épuisés et anéantis par la pauvreté. Les états généraux de la Jeunesse, en lieu et place du dialogue intergénérationnelle, pour marquer l’Année de la Jeunesse, instituée par le Président de la République, est perçue comme une volonté dissimulée des adversaires du Président pour briser ses bonnes intentions, en faveur de la jeunesse de son pays.

Voilà donc le Congo. Une République unie et indivisible dont la cohésion nationale est pourtant une recherche permanente. Mais, toute voix, hors pouvoir, susceptible de créer de possibles valeurs pour l’intérêt de la nation, dans un contexte où le pays en a visiblement besoin, est soupçonnée d’être une piste destructrice pour la nation.
Heureusement et à juste titre que le désir pressant d’apporter des réformes majeures au Congo est incontournable. Et bien perceptible dans le pays. Ces réformes sont facteur de normalisation de la démocratie, de la République, du respect des libertés fondamentales et d’une distribution plus équitable des ressources nationales. Etant entendu qu’une telle distribution est favorable au développement.


Ouabari Mariotti