Insolite: Le ministre d’Etat Claude Nsilou devient français à 75 ans

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L’acquisition tardive de la nationalité française du ministre d’Etat Claude Alphonse N’silou en procès à Brazzaville

S’il est vrai que Claude Alphonse N’silou, président du Rassemblement Citoyen, un parti affilié à la majorité présidentielle, ne risque rien sur le plan juridique, eu égard à la primauté de la Constitution du 25 octobre 2015 sur toutes les dispositions de la loi de 1961, notamment l’article 47, c’est surtout sur le plan de l’éthique politique que l’acquisition tardive de la nationalité française par le ministre d’Etat, ministre du commerce, de la consommation et des approvisionnements, laisse à penser qu’il y a anguille sous roche. Analyse.

Ferdinand Oyono, talentueux romancier camerounais décédé en 2010, avait écrit « Le Vieux nègre et la medaille » et  » Chemin d’Europe », qui lui ont assuré une place de choix au firmament de l’ intelligentsia africaine. Les deux œuvres sont construites autour du combat d’un homme noir qui passe par des flétrissures, l’abandon de ses valeurs et principes ancestraux pour mériter une reconnaissance du colon français, et l’envie de rejoindre la France.

C’est la caricature que l’on est tenté de coller au ministre d’Etat, ministre du commerce, des approvisionnements et de la consommation, Claude Alphonse N’silou, 75 ans, qui vient d’acquérir tardivement la nationalité française. La question ne se serait pas posée si l’homme n’était pas l’auteur, en avril dernier, d’une publication au titre provocateur,  » N’ayez pas peur, la démocratie va prévaloir », un recueil de ses anciennes publications en politique.

S’il est vrai que N’silou ne risque rien sur le plan juridique, son acquisition tardive de la nationalité française, qui coïncide avec la sortie de son sum up des publications en politique, est sujette à diverses interprétations, surtout pour un homme politique de la trempe du richissime Claude Alphonse N’silou, président du Rassemblement Citoyen, un parti politique affilié à la majorité présidentielle. ́N’silou voudrait-il s’abriter derrière sa nationalité française à la moindre incartade ? Pourquoi prend t-il la nationalité française maintenant, alors qu’il aurait dû la prendre plus tôt comme certains de ses collègues du gouvernement ? Comment comprendre la réponse positive de la France, engagée depuis le passage de Sarkozy à l’Elysée, dans l’  » émigration choisie  » en sourdine, c’est-à-dire l’accord d’octroi de la nationalité française à des jeunes africains plus intelligents et innovants – N’silou est vieux et architecte moyen pour rivaliser avec des orfèvres dans ce domaine?

? Une valse de questions suscitée par l’ « attitude vindicative » dont l’accusent de méchantes langues proches du parti dominant, le Pct au pouvoir. L’ inconstitutionnalité de la perte et la déchéance de la nationalité congolaise

Selon des exégètes du droit, la loi de 1961 est tombée en désuétude, plus précisément certaines de ses dispositions. Il s’agit notamment de toutes celles qui ont trait au titre 3, premier chapitre: « la perte et la déchéance de la nationalité congolaise ». En effet, l’article 19 de la Constitution de la République du Congo adoptée par référendum le 25 octobre 2015 dispose:

“La citoyenneté congolaise est garantie par la loi. Tout congolais a le droit de changer de nationalité ou d’en acquérir une seconde”.

Tenant compte de la hiérarchie des normes, argumente l’expert en droit auquel nous avons eu recours, la théorie chère à Hans Kelsen, la Constitution est au sommet de la pyramide des normes. Ces dispositions relatives à l’exclusivité de la nationalité congolaise sont donc inconstitutionnelles.

En clair, Claude Alphonse N’silou a droit, comme la plupart des autorités congolaises, de garder sa nationalité congolaise, en sus de la nationalité française qu’il vient d’acquérir.

C’est différent en RDC et au Cameroun, qui ont constitutionnalisé l’exclusivité de la nationalité congolaise RD et camerounaise.

A. Ndongo, journaliste économique et financier