La rencontre est qualifiée d’historique. Le président ivoirien Alassane Ouattara et son prédécesseur Laurent Gbagbo se sont rencontrés pour la première fois depuis la crise postélectorale de 2010–2011. La rencontre s’est déroulée au palais présidentiel d’Abijan et a duré une heure.
Après une heure d’entretien, Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara sont sortis du salon du petit palais de la présidence, précédés par quelques cadres de leurs partis respectifs, rapporte notre correspondant à Abidjan, Sidy Yansané.
Les deux présidents ont fait chacun une déclaration à la presse dans une ambiance très amicale, très fraternelle. Souriants, tactiles et presque complices…. Difficile d’imaginer qu’une guerre sanglante a opposé les partisans d’Alassane Ouattara et ceux de Laurent Gbagbo il y a à peine dix ans. Ils ont tour à tour pris la parole de façon très brève. Le ton était détentu, souvent blagueur, comme quand Laurent Gbagbo laisse échapper un « n’est-ce pas Alassane ? » avant de se reprendre d’un « pardon Monsieur le Président »…
D’abord Laurent Gbagbo a précisé que durant l’entretien avec le président Alassane Ouattara avoir abordé le sujet des prisonniers politiques détenus depuis la meurtrière crise post-électorale de 2010-2011, qui est à la base de la déchirure des deux camps depuis maintenant dix ans. Laurent Gbagbo lance un appel à cette libération et évidemment il laisse comme seul juge le président Alassane Ouattara pour prendre une décision.
Et je suis très heureux de cette discussion que nous avons eue. Je suis très heureux, parce qu’elle était très détendue et je suis fier de ça… J’ai souhaité que, de temps en temps, on puisse avoir ce genre d’entretiens qui détendent l’atmosphère dans le pays. En ce qui me concerne, avec le président, j’ai insisté sur les prisonniers arrêtés au moment de la crise de 2010-2011 et qui sont encore en prison. Alors, j’ai dit au président – et vous serez d’accord avec moi – que j’étais leur chef de file et moi je suis dehors aujourd’hui. Eux, ils sont en prison. Et j’aimerais que le président fasse tout ce qu’il peut pour les libérer. J’ai insisté sur cela. A part ça, on a parlé de la Côte d’Ivoire qui doit aller de l’avant !
Laurent Gbagbo: «On a parlé fraternellement, amicalement…»
D’autres réunions à venir
Le président Alassane Ouattara, qui a tout d’abord commencé par remercier son interlocuteur, le qualifiant de « jeune frère », a aussi présenté ses condoléances à Laurent Gbagbo pour le décès de sa mère, morte pendant qu’il était détenu à la CPI. Cela a rappelé à M. Ouattara que sa propre mère était décédée alors qu’il était en exil en France, au milieu des années 2000, et que Laurent Gbagbo, alors président, avait facilité son retour.
Le calendrier et les opportunités nous ont amenés à avoir cette rencontre aujourd’hui. Je voudrais dire que j’en suis ravi et je crois que c’est surtout le peuple de Côte d’Ivoire qui attendait cela avec beaucoup d’impatience. Maintenant, c’est chose faite et je voudrais que nous puissions nous féliciter d’avoir eu cette rencontre qui a été cordiale et fraternelle, parce que Laurent est mon jeune frère et mon ami. Bien sûr, il y a eu cette crise qui a créé des divergences, mais cela est derrière nous. Ce qui importe, c’est la Côte d’Ivoire, c’est la paix pour notre pays. Et c’est comme dit Laurent, c’est pour nous d’avancer, d’aller de l’avant pour, bien sûr, nous-mêmes et pour les prochaines générations
Alassane Ouattara: «Une rencontre cordiale et fraternelle…»
Alassane Ouattara s’est aussi félicité de ce premier rendez-vous : « C’était important de rétablir la confiance », a-t-il indiqué. Il a assuré que ďautres réunions avec son prédécesseur sont à venir, après le mois d’août selon le président. Des réunions qui seront élargies aux autres figures de la scène politique ivoirienne. On pense bien sûr à Henri Konan Bédié, président du PDCI, qui a basculé dans ľopposition il y a trois ans, avant de s’allier récemment au FPI de Laurent Gbagbo.
M. Ouattara comme M. Gbagbo ont insisté sur leur volonté ďaller de ľavant. Et ľavant, c’est la marche vers une véritable réconciliation nationale. Et les deux hommes ont quitté la salle de presse main dans la main, symbole de l’image qu’ils ont voulu donner de cette rencontre, celui d’une page tournée.