Mabiala Ma Nganga, figure controversée et précurseur de la résistance contre l’occupation coloniale du Congo

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A la tête de la tribu locale des Bassoundi, Mabiala Ma Nganga a organisé la résistance contre l’occupation coloniale. Compromettant plusieurs missions d’exploration, à travers des actes de sabotage et de guets-apens. Ce dernier, considéré par les colons comme un détestable brigand, reste tout de même un héros, un martyr, un résistant opposé au travail forcé.

La période allant de la fin du XIXe siècle jusqu’au début du XXe siècle a été riche d’événements : l’expansion coloniale, la mise en place du système concessionnaire, l’introduction de l’impôt de capitation, le travail forcé, le portage, la construction du chemin de fer et l’éveil du nationalisme. Ces événements font partie intégrante de l’histoire congolaise et seront à la l’origine de la remise en cause du système colonial sous diverses formes de contestation à l’ordre établi. Il y a une nécessité de faire une relecture de l’histoire des mouvements de résistance à la pénétration, la conquête et la domination coloniale au Congo.

Qui était Mabiala Ma Nganga ? 

Sa date de naissance n’est pas connue avec exactitude, Mabiala Ma Nganga fut le Chef suprême de la tribu Bassoundi, basée à Balimonéké. Les Bassoundi sont une composante du peuple Kongo, occupant l’immense territoire chevauchant les actuelles régions de la Bouenza et le Sud du Pool. Établi avec sa femme Mama Ngunga, son neveu Mabiala ma Nkenke et son clan à Makabandilou. Mabiala fait irruption dans l’histoire comme un résistant intransigeant. 

À l’époque de Mabiala Ma Nganga, la piste de caravane devient une véritable colonne vertébrale de l’occupation française en Afrique centrale. Des milliers d’hommes et de femmes continuent à la sillonner dans les deux sens, pour convoyer les marchandises commandées d’Europe par les factoreries de l’intérieur et pour évacuer les richesses de tout le bassin du Congo vers la côte de Loango. 

Les taux de mortalité des porteurs n’avoisinent sans doute pas ceux qui ont accablé les esclaves, mais beaucoup périssent avant d’atteindre leur destination. 

Le long de la piste des caravanes, entre Comba et Mindouli, l’expédition de Marchand est attaquée par des populations des Bassoundi, cette attaque est menée par Mabiala Ma Nganga accompagné de son neveu, Mabiala Ma Nkenke, Mayéké et Missitou.

Son combat (la résistance) 

En 1892, Mabiala Ma Nganga attaque un convoi commandé par un agent français, Mourier Laval, le tue et s’empare des dépouilles opimes. Sa légende naît et se répand dans les villages de la région comme un feu de brousse. Lorsqu’une partie de la mission Marchand fait escale à Libreville, le 22 mai 1896, la nouvelle de la rébellion de Mabiala Ma Nganga est déjà sur toutes les lèvres. On le croit invincible grâce à ses fétiches qui font trembler ses adversaires, y compris les Français.

Qu’il reste impuni pour ce crime et surtout qu’il continue à éluder les expéditions punitives que les Français organisent contre lui finit par convaincre la population de son invulnérabilité. On le croit à Comba, à 90 kilomètres de Brazzaville, mais il disparaît pour réapparaître où on l’attend le moins et contrecarrer les projets de pénétration coloniale. 

En mai 1896, il neutralise la ligne télégraphique Loango-Brazzaville en escamotant vers Coumba les isolateurs en porcelaine qui attachent les fils aux poteaux. Selon les rapports que dressent les Européens, « la route de Loango à Brazzaville était devenue impraticable et dangereuse pour les caravanes, aussi bien pour les porteurs noirs que pour les Européens, par suite des exactions, brutalités, vols, et quelquefois assassinats, dont ils étaient les victimes de la part des chefs des villages, qui les rançonnaient à leur aise ».

Parfois, l’attaque, ou parfois seulement la « rumeur » d’une attaque imminente, produit une panique telle que les porteurs jettent leur charge à terre et prennent la poudre d’escampette. Mabiala et ses hommes s’en donnent alors à cœur joie, pillent à volonté et amènent tout ce butin dans leur caverne. Il devient même impossible pendant plusieurs mois, note un officier français, « de mettre en route une seule caravane sans que celle-ci abandonne ses charges à quelques kilomètres de Loango 15 ». Pendant près d’un an, entre 1895 et 1896, près de 6 000 colis destinés à la colonie déshéritée du Haut-Oubangui (qui compte Bangui comme chef-lieu) languissent dans les entrepôts de Loango.

Cependant, les guets-apens, les stratagèmes et les sabotages qu’il organise, la ferveur populaire que suscitent ses exploits, ses fétiches protecteurs qui partout sèment l’effroi, saturent la conscience populaire pour des générations à venir. 

L’administration coloniale ne pouvant laisser cet acte impuni décida de le châtier. Mabiala Ma Nganga prit sa fuite, cependant les nombreux échecs essuyés par l’administration coloniale pour sa capture ne firent qu’accroitre son prestige déjà considérable. Hantée par l’ombre d’un Mabiala vivant, la route des caravanes Brazzaville -Loango était réputée dangereuse voir impraticable.

Dans la nuit du 21 au 22 octobre 1896, Baratier accompagné d’un « traitre » parvient à retrouver les traces de Mabiala Ma Nganga qui s’était réfugié dans une de ces grottes ; ils s’en seraient suivi des combats qui auraient duré plus de 12 heures, Mabiala Ma Nganga trouva la mort, suite à une dynamite jetée dans une grotte où il s’était réfugié. Sa tête fut tranchée, et exhibée le long de la piste des caravanes par l’expédition française. Le reliquat des troupes du défunt essaya en vain de poursuivre les combats, mais fut éliminé progressivement par les positions françaises, le long de ladite piste. Ainsi fut-elle pacifiée, mais la résistance gagna désormais le cœur des autres populations du Pool et des environs.

Cependant, pour le colon, Mabiala Ma Nganga fut un fourbe, un brigand auteur de plusieurs crimes impunis, un coupeur de route, détrousseur de caravanes, qui utilisait son intelligence qu’au mal attiré par les richesses qu’il voulait s’approprier au moyen d’une ruse qui consistait à créer une révolte qui se terminait par des palabres dans lesquelles après avoir morigéné le coupable on lui redistribuait des cadeaux avec une certaine générosité. Mabiala Ma Nganga est parfois décrit comme un vulgaire bandit, qui en voulait simplement aux marchandises transportées par l’expédition, ou encore comme un vrai résistant, soucieux de protéger les siens contre ce qu’il qualifiait d’agression étrangère.

Rappelons que, le 19ème siècle est marqué par l’abolition du commerce de l’esclavage par les traités de 1831 et 1833, auquel s’est substituée dans ses dernières décennies une forte activité exploratrice de l’Afrique, menée par les grandes puissances coloniales en quête de nouveaux territoires pour l’affirmation et l’accomplissement de leur suprématie. La France et l’Angleterre principalement, grâce aux explorateurs Livingstone et Pierre Savorgnan De Brazza se trouvèrent maîtres de plusieurs territoires, du Golfe de Guinée à la Mer Rouge et de la Méditerranée au Cap.