Le président Ouattara déclare que Gbagbo et Blé Goudé «sont libres de rentrer en Côte d’Ivoire»

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Le président Alassane Ouattara a donné mercredi son feu vert au retour en Côte d’Ivoire de son grand rival l’ex-président Laurent Gbagbo et de son ancien ministre de la Jeunesse Charles Blé Goudé, « quand ils le souhaitent », une semaine après leur acquittement définitif de crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale.

« Messieurs Gbagbo et Blé Goudé sont libres de rentrer en Côte d’Ivoire quand ils le souhaitent », a déclaré le président Ouattara à l’ouverture du premier conseil des ministres de son nouveau gouvernement formé mardi. 

Le président ivoirien promet que « les frais de voyages de M. Laurent Gbagbo et ceux des membres de sa famille seront pris en charge par l’État de Côte d’Ivoire. » Le président ivoirien ajoute que des « dispositions seront également prises pour que Laurent Gbagbo bénéficie (…) des avantages et indemnités dus aux anciens présidents de la République ». Concrètement Laurent Gbagbo bénéficiera d’une allocation viagère, et de personnels comme des agents de sécurité, et des collaborateurs payés par la présidence de la république. 

Des dispositions seront prises pour que Laurent Gbagbo bénéficie des avantages et indemnités dus aux anciens présidents de la République

Alassane Ouattara président de la Côte d’Ivoire

Sur le plan pénal, les anciens présidents de la République en Côte d’Ivoire ne bénéficient pas d’immunité, et Laurent Gbagbo est sous le coup d’une condamnation par contumace à 20 ans de prison pour l’affaire dite « du casse de la BCEAO ». Laurent Gbagbo pourrait-il alors être arrêté à sa descente d’avion ?

« A moins que vous pensiez que le chef de l’État soit particulièrement cynique, ça me paraît un peu gros d’offrir les frais de voyages à quelqu’un juste parce qu’on a envie de le mettre derrière les barreaux », a répondu le nouveau porte-parole du gouvernement, Amadou Coulibaly ce mercredi. Depuis plusieurs mois, la présidence laisse entendre qu’une grâce ou une amnistie pourrait être prononcée en sa faveur.

Alassane Ouattara pourrait donc privilégier la réconciliation et accorder une amnistie à son prédécesseur, comme il l’a fait en 2018 pour ľex-premiere dame Simone Gbagbo. En revanche, rien n’indique pour l’instant que le même geste de clémence pourrait bénéficier à Charles Blé Goudé.

Ce dernier est lui aussi sous le coup d’une condamnation à 20 ans pour des faits commis lors de la crise post-électorale. Lui aussi est libre de rentrer, a dit Alassane Ouattara qui n’a pas mentionné de prise en charge de frais de voyage le concernant. L’ancien ministre de la Jeunesse attend d’ailleurs toujours son passeport.

C’est une déclaration de nature à ramener un peu plus de paix, de bonheur dans le cœur des Ivoiriens. C’est cela que nous attendions d’Alassane Ouattara depuis le début de cette affaire.

Le statut des anciens présidents ivoiriens

En Côte d’Ivoire, le statut des anciens présidents est régi par une loi de 2005 et un décret d’application de 2006, tous deux signés à l’époque par un certain… Laurent Gbagbo. En vertu de ce texte, l’ancien président devrait bénéficier d’une allocation viagère d’un peu moins de 10 millions de francs CFA par mois. A quoi il faut ajouter des indemnités de logements et des frais divers pour 7,5 millions de francs. Au total donc environ 17 millions de francs CFA soit 26 000 euros par mois. Si ce barème est appliqué rétroactivement sur 10 ans, Laurent Gbagbo devrait toucher l’équivalent de 3 200 000 euros.

En plus de l’aspect financier, l’ancien président a droit à du personnel. Un aide de camp, une dizaine d’agents de sécurité et des collaborateurs : un chef de cabinet, un chargé de protocole, un chargé de mission et 2 secrétaires. Du personnel de maison aussi (maitre d’hôtel, cuisinier, jardinier…), ainsi que 3 chauffeurs pour trois véhicules mis à sa disposition. Au total une grosse vingtaine de personnes payés par la présidence ivoirienne.

Le statut d’ancien président ne confère pas d’immunité sur le plan pénal mais octroie des procédures spéciales qui nécessitent notamment l’accord de l’Assemblée nationale.