Bien qu’ils soient voisins dans l’immeuble où se trouvent leurs bureaux respectifs, et qu’ils partagent des liens fraternels, les deux ministres ne parviennent guère à s’accorder. Chacun semble avoir son propre « bouaga » pour éviter d’encourir la colère de l’autre. Tant pis pour l’exécution harmonieuse du budget 2025 !
Un jour pair, le ministre de l’Économie et des Finances, Jean-Baptiste Ondaye, choisit d’ignorer la décision prise par le Premier ministre, Anatole Collinet Makosso, lors de la réunion interministérielle qu’il a présidée le 30 décembre 2024. Cette décision portait sur le transfert méthodique du Guichet Unique de Paiement, en attendant que le Trésor Public s’ajuste aux réformes en cours et que le décret régissant ce contrat de prestation de services, signé en 2022 par le ministre Rigobert Roger Andely entre la Banque Postale du Congo et le Trésor Public, soit remplacé par un autre décret, conformément aux règles élémentaires du droit administratif. Pour apaiser les tensions, Collinet Makosso a même reçu chez lui les responsables du syndicat du Trésor, leur promettant un retour aux missions qui lui incombent, en attendant qu’un coup d’accélérateur soit donné aux réformes.
Un jour impair, son collègue Ludovic Ngatsé, ministre du Budget, du Portefeuille Public et des Comptes Publics, rappelle aux directeurs des impôts et des douanes l’importance d’un respect strict des décisions prises lors de cette réunion interministérielle. Il n’en fallait pas plus pour que le conseiller du ministre des Finances, Lauric Ngouembe, agisse tel un fou du roi en bloquant la machine de paiement des frais douaniers au guichet de paiement de la Banque Postale du Congo, située au port autonome de Pointe-Noire.
Ainsi fonctionne notre République où chaque partie se prévaut d’arguments souvent spécieux pour justifier sa décision. Le bicéphalisme administratif qui oppose les deux ministres, Ludovic Ngatsé et Jean-Baptiste Ondaye, a cependant délimité les domaines d’intervention et de compétence de chacun. Comment le conseiller du ministre Ondaye, certainement mandaté par son supérieur hiérarchique, peut-il intervenir dans une sphère qui ne relève pas de sa compétence ? Quoi qu’il en soit, cette guerre par procuration entre Ondaye et Ngatsé coûte cher à la République, surtout en ce début d’exercice budgétaire marqué par le défi d’optimiser le recouvrement des recettes publiques et à un an des élections présidentielles de 2026. Peut-être, est-il temps que le Chef procède à un mini réamenagement technique de l’équipe gouvernementale en jumelant, avant la présidentielle 2026, les ministères du budget, du portefeuille public et des comptes publics, et celui de l’économie et des finances. Et comme une justice à la Salomon guide souvent Denis Sassou Nguesso dans ce genre d’arbitrage, ni Ondaye ni Ngatse ne devraient pas en être les prétendants.
A.Ndongo, journaliste économique et financier