Haïti: un an après l’assassinat de Jovenel Moïse, le point sur l’enquête

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Dans les premières heures du 7 juillet 2021, le président haïtien Jovenel Moïse était assassiné dans sa résidence privée d’un quartier cossu de la région de Port-au-Prince. Le commando armé se faisait passer pour une opération de la DEA, l’agence américaine anti-drogue. Le chef de l’État est criblé de 12 balles. Son épouse Martine Moïse est grièvement blessée, mais survit l’attaque. Aucun coup de feu n’est tiré par les policiers et gardes présidentiels en poste cette nuit-là.

Un an après l’assassinat de Jovenel Moïse, les commanditaires et le motif du crime restent inconnus. 73 personnes sont visées par l’enquête judiciaire, 43 d’entre elles ont été inculpées. Si l’on sait aujourd’hui que l’assassinat a été planifié en grande partie à l’extérieur d’Haïti, l’instruction du dossier à Port-au-Prince n’avance pas.

Le soir des faits, il était environ 1h du matin mercredi 7 juillet 2021 lorsque des coups de feu ont résonné près de la résidence de Jovenel Moïse. Le président saisit alors son téléphone, appelle à l’aide sa garde rapprochée et les responsables de sa sécurité, mais ces derniers n’arriveront jamais.

Une vingtaine d’hommes armés pénètrent dans le complexe où loge la famille présidentielle. Le président est abattu dans sa chambre : 12 impacts de balles sont retrouvés sur sa dépouille.

Blessée au bras, la première dame Martine Moïse raconte avoir juste eu le temps de cacher ses enfants. Elle soutient que le commando cherchait un document et qu’il l’a trouvé. Le jour même, l’état de siège est instauré et la veuve de Jovenel Moïse est alors transférée dans un hôpital de Miami.

Aucun membre de sa garde blessé

De nombreuses zones d’ombre persistent, comme qui sont les commanditaires, pourquoi le président a-t-il été ciblé et pourquoi aucune des dizaines de personnes chargées de sa protection rapprochée n’a été blessée cette nuit-là.

Gédéon Jean, du Centre d’analyse et de recherche en droits de l’Homme, a des doutes sur la compétence des cinq juges qui se sont succédé pour mener l’instruction. « Il s’agit d’un crime transnational : un président qui a été assassiné chez lui par des mercenaires, avec une implication de plusieurs territoires : américain, colombien, dominicain. Donc là il faut vraiment des juges spécialisés et compétents pour pouvoir mener une vraie enquête. »

Les États-Unis ont lancé leurs propres investigations et avancent bien plus rapidement que la justice haïtienne, explique Jacqueline Charles, journaliste du quotidien Miami Herald :

« Actuellement, trois individus ont été inculpés et sont détenus aux États-Unis. Mario Palacios Palacios, un ancien soldat colombien, Rodolphe Jaar, un entrepreneur haïtien. Et le troisième est un ancien sénateur haïtien, Jean Joël Joseph. Lui aussi parle aux enquêteurs américains. C’est un acteur clé. L’enquête américaine pourrait permettre aux Haïtiens d’obtenir certaines réponses, peut-être pas toutes, mais au moins certaines réponses concernant ce crime majeur. »

Dans un entretien accordé à RFI, Martine Moïse, la veuve de l’ancien président, a dénoncé « un refus des actuelles autorités haïtiennes de rendre justice » à son mari.

Le gouvernement et la famille Moïse s’apprêtent à rendre hommage séparément au président assassiné il y a tout juste un an. Une cérémonie est notamment prévue à Pèlerin 5, dans la région de Port-au-Prince, là où résidait le président de la République.