[Tribune]: le peuple congolais et les 100 familles régnantes. Tous contre le projet de succession dynastique du pouvoir

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Depuis 2002 les élections se suivent et se ressemblent au CONGO-BRAZZAVILLE comme une inépuisable mascarade dont la formalité consultative relève toujours des mêmes mécanismes avec des résultats connus d’avance. À la différence près que si les élections présidentielles ont pour but essentiel d’humilier les adversaires les plus crédibles de Denis SASSOU-NGUESSO, lesquels sont l’objet tantôt d’intimidations sur fond de violence meurtrière (Parfait KOLELAS et Albert ONIANGUE), tantôt de mesures privatives de liberté (Jean-Marie Michel MOKOKO et OKOMBI Salissa) ; les élections législatives, quant à elles, ont pour but de préparer à sa succession.

SASSOU-NGUESSO ne fait jamais rien à l’aveuglette, rien qu’il n’ait déjà annoncé et il dit toujours ce qu’il va faire. Son inconscient de pervers narcissique est si puissant qu’il le trahit toujours mais les autres, ses adversaires, doutent toujours, par naïveté, de la véracité de ses dires, croyant qu’il ne peut pas franchir certaines limites. Par dignité ou par respect pour la parole donnée. Or, SASSOU-NGUESSO est un parjure, ne connaissant aucune limite, ni dans la déloyauté, ni dans la violence.

C’est dans ce cadre que les supposées législatives de juillet 2022 ont pour horizon de préparer l’accession de Denis Christel SASSOU-NGUESSO au pouvoir. SASSOU-NGUESSO veut accompagner son fils vers le pouvoir suprême par l’ascension des enfants des « autres », et ce, à la faveur d’un contrôle total hiérarchisé du parlement que l’on voit bien se dessiner. Tout d’abord avec l’arrivée de la pléthore des enfants NGUESSO et SASSOU-NGUESSO. Ensuite, avec ceux des dignitaires du Parti Congolais du Travail (PCT). Enfin, ceux des soi-disant oppositionnels qui ont fait allégeance au pouvoir (TSATY MABIALA, FILA SAINT Eudes, Jean-Marc THYSTERE TCHICAYA) auxquels pourront être associés certains oppositionnels(les) qui seront récompensés(e)s de quelques strapontins pour leur légitimation, grâce à leur participation à cette mascarade électorale, de ce projet de succession dynastique du pouvoir.

C’est dans ce contexte que les élections à prétention législative et locale dont les supposés résultats ont été publiés le 15 juillet 2022 traduisent la plus grande farce de l’histoire politique du CONGO-BRAZZAVILLE. Une imposture intellectuelle qui défie toutes les limites de l’inimaginable.

De mémoire de congolais, depuis l’Abbé Fulbert YOULOU, jamais ce pays n’avait atteint un si haut degré de médiocrité que sous le régime actuel, lequel a rendu ce 15 juillet 2022 une copie conforme de sa répugnance laideur. Le contraire eut été étonnant.

Les députés sont nommés par la seule volonté et caprices d’un pervers narcissique sans scrupules et défiant toute limite transgressive. Un prince accroché à l’exercice solitaire et autoritariste du pouvoir, au point d’avoir réduit ses alliés politiques et leurs enfants en esclaves assujettis à sa volonté. Par ailleurs, le profil de ces supposés députés, pompeusement appelés « Honorables », particulièrement celui des enfants des barons du régime PCT, apporte un éclairage sur la disqualification/déconstruction du processus de légitimation et de reproduction des élites hérité de la période coloniale. Ce parcours de légitimation des élites est évacué par l’arrivisme des enfants des barons du PCT. Le temps où le Congo pouvait se vanter de la qualité de ses élites outillées intellectuellement et bien formées est bien révolu.

Le naufrage et la faillite de l’intelligence, solubles dans le projet de la transmission familiale du pouvoir, étaient prévisibles, puisqu’aujourd’hui Juges et Avocats, Hauts Magistrats, Notaires et Huissiers, Hauts gradés de l’armée et Ministres, Ambassadeurs, Députés et Sénateurs, Prêtes et Pasteurs des églises, Musiciens et Francs-Maçons se trouvent du même côté, celui de l’argent tiré de l’accumulation matérielle procuré par l’appareil d’Etat et du pouvoir répressif. Au point que le peuple délaissé et sans défense n’a d’autre recours que le repli identitaire et clanique.

Notre peuple n’est ni mort ni défait. Il trouvera l’énergie nécessaire pour s’affranchir des prétentions hautement hégémoniques des cent familles régnantes et arrivistes, lesquelles sont engluées dans l’illusion faussement tirée de la toute-puissance.

Hier, la révolution à prétention marxisante dévorait ses enfants, puisqu’elle n’était pas un dîner de gala mettant en scène des femmes et des hommes de la bonne société distinguée et élégante. Aujourd’hui, c’est la lutte contre le régime de la restauration autoritariste, autour duquel se sont agglutinées les cent familles régnantes, qui emporte les enfants. Les rescapés de l’hédonisme de la cruauté sont contraints à l’exil, errant comme des albatros à travers le monde. Nos mamans n’ont pas fini de pleurer leurs enfants. Du sang et des larmes. L’exil ou la tombe.

Tout se passe comme si ce CONGO, legs de nos ancêtres, pays béni des Dieux et désormais accaparé avec une rare gloutonnerie par les cent familles, n’est plus le nôtre. Comme si le destin de chaque congolais privé de libertés et de droits était assimilable à celui de l’écrivain allemand Thomas MANN, auteur du « Docteur Faustus ». En 1938, face à la montée et à la brutalité du régime du Troisième Reich il est contraint de quitter l’Allemagne. Dans le train qui l’amène en exil vers Paris avant de rejoindre les États-Unis, il écrira  » L’Allemagne m’a tout donné, je lui ai tout donnée. Elle m’a tout repris, je ne lui ai plus rien demandée, cette Allemagne m’est devenue indifférente ».

Face à l’arrogance des cent familles oisives et dépensières, confiscatrices des droits démocratiques du peuple congolais, le CONGO-BRAZZAVILLE est promis à toutes sortes de convulsions à cause d’un projet de succession de type dynastique du pouvoir. Et, la prise de la BASTILLE dans sa version congolaise n’est plus une simple vue de l’esprit, mais une réalité en gestation dont les prémisses ont été observables à EWO, TSIAMBA-NZASSI, MOUYONDZI, SIBITI, MADIBOU, KÉLLÉ, LEKANA, MVOUTI, MOSSAKA, BACONGO, GAMBOMA et KINSOUNDI. Ces contestations transversales et transethniques traduisent l’amorce d’un début de dépassement de la bipolarité symbolique nord-sud sud, prélude à la construction d’une conscience historique au soutien de laquelle le peuple congolais livrera l’ultime bataille pour déconstruire le projet de succession dynastique en cours de formalisation mais dont le débouché est loin d’être acquis.

S’impose historiquement un sursaut national et patriotique des élites et du peuple afin de rompre avec l’innommable caractéristique de la gouvernance dynastique de ce jour.

L’élite congolaise doit s’affranchir des chaînes du conformisme intellectuel étouffant et dénoncer avec objectivité nos maux. A défaut, elle sombrera comme les universitaires capitulards qui émergent, à la faveur des prébendes, en périphérie du régime de la restauration autoritariste.

Les élites et le peuple doivent s’impliquer dans la lutte pour la restauration de la démocratie afin d’apporter une réponse crédible sous forme de projet sociétal porté par un leader patriotique et transethnique, capable de fédérer toutes les composantes de la société congolaise dans un élan de communion nationale.

Roger MVOULA MAYAMBA
Juriste