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[Tribune] : le 21 Mars, autopsie d’une défaite assurée du candidat Sassou Nguesso

Le rendez-vous électoral du 21 prochain ne fait pas l’unanimité dans l’opinion congolaise. Plusieurs voix de personnalités politiques et de la société civile appelant au boycott du scrutin se sont font toujours entendre avec écho auprès d’une population congolaise désenchantée par l’asservissement sociopolitique du régime PCT et la déconfiture de la situation économique du pays. La majorité des leaders des formations politiques d’opposition locales se sont retirés de la course électorale tandis que ceux de la diaspora recommandent à qui veut les entendre au pays de ne point y participer. Quelques leaders d’opinion de la société civile, tous statuts sociaux confondus, émettent de sévères critiques sur les conditions d’organisation de ce scrutin jugées inéquitables et non transparentes. Ils s’érigent en porte-parole de la société dont ils expriment les profondes inquiétudes sur d’éventuelles dérives sécuritaires devenues systématiques consécutivement à toute proclamation de résultats d’élection présidentielle.

Le peuple, toutefois, détient opinion autonome, quoique partagée, sur ce scrutin inspirée par son vécu quotidien marqué de toutes sortes de frustrations. Habituellement engagé dans les affaires de la cité, il est aujourd’hui peu enthousiaste car désabusé des suites des injustices sociales, des privations économiques, de la corruption et de la démagogie de la tribu sassoviste cramponnée au pouvoir. Les Congolais affichent aujourd’hui un désintérêt patent pour la politique, en général, et les élections, en particulier, dont l’opacité présume des résultats frauduleux. Démotivés, les potentiels électeurs sont probablement nombreux à ne s’être pas inscrits sur les listes électorales et ne pourront donc voter le jour du scrutin. Ce sera un déficit considérable pour le système électoral qui tiendra hors-circuit de votants ce capital humain gagné par le désintéressement de la politique jusqu’à renoncer délibérément à l’exercice d’un droit civique fondamental comme le droit de vote. Cette attitude ressemble à un suicide passif, à l’instar d’un gréviste de la faim qui refuse exprès de manger le repas de son geôlier. C’est une grave erreur de calcul politique dont les Congolais n’évaluent pas pertinemment les conséquences dommageables aujourd’hui.

Toutes ces tergiversations et indécisions conduisent à soutenir que les Congolais négligent une aubaine pour déchoir un tyran qui ne les a que trop longtemps martyrisés politiquement et sacrifié économiquement par la confiscation de leurs ressources naturelles. Aujourd’hui, ce dictateur, en proie à la sénilité et à la maladie, ironiquement surnommé « Empereur », présente des signes de faiblesse qui présagent une fin cyclique de son règne. Toutes les conditions sont réunies pour le faire écarter du pouvoir même par le plus faible des adversaires candidats à cette élection à une seule condition : un vote-sanction massif. Il ne reste qu’au peuple d’agir conséquemment.

En effet, jamais le président sortant, candidat du PCT au pouvoir depuis un demi-siècle, n’a été aussi impopulaire et affaibli qu’auparavant à l’orée d’une élection en raison de son bilan catastrophique que l’un des opposants, Modeste Boukadia du CDRC, résume en des termes clairs et sous un ton interpellant dans son communiqué de presse du 25 janvier dernier (https://cdrc-cg.com/2021/01/25/face-a-sassou-le-peuple-congolais-se-reveille-et-prend-a-temoin-le-monde-entier-annoncez-le/): . « Quand un président de fait a échoué sur tous les plans au niveau national : pas d’hôpitaux, pas d’écoles, pas d’électricité, pas d’eau courante, pas de routes, pas de chemins de fer, des pensions non payés depuis trois ans pour certains militaires, des pensions de retraite non pays depuis près de trente mois, des salaires et des bourses au compte-goutte, des étudiants livrés à eux-mêmes à l’étranger, des crimes économiques de grande ampleur, un génocide d’Etat dans la région du Pool ; quand celui qui a échoué pendant quarante ans se déclare candidat à sa propre succession avec pour seul projet de « mourir au pouvoir », faut-il le laisser faire ? ».

Le candidat est physiquement affaibli. L’Homme du 05 février n’est plus que l’ombre de lui-même. Sa santé, sensiblement détériorée inquiète au point qu’un journal numérique, Sacer-infos.com, dans son édition d 08 fevrier dernier (https://sacer-infos.com/mars-2021-disposant-de-son-dossier-clinique-la-france-ne-panique-pas-et-prepare-lapres-sassou/) en a filtré l’information pour ne pas laisser les Congolais dans l’ignorance. « A Paris, le dossier clinique de Denis Sassou Nguesso est bien connu et la maladie qui ronge le dictateur ne l’augure plus grand-chose » a écrit Stany Franck. Dans une édition ultérieure du 18 février, (https://sacer-infos.com/pourtant-inapte-cancer-de-la-prostate-et-drepano-partiel-sassou-valide-par-la-cour-constitutionnelle/) le journal spécifie les pathologies qui affectent la santé de notre président candidat et dont la gravité entache son éligibilité pour la fonction présidentielle au regard de la Constitution en vigueur : « Les trois médecins choisis pour faire le bilan de santé des candidats à la présidentielle du 21 mars n’ont trouvé aucune maladie au candidat Denis Sassou Nguesso dont l’état de santé est connu pourtant de tous. Ce candidat est non seulement atteint d’un cancer de la prostate, mais aussi d’une drépanocytose partielle qui devraient l’invalider à postuler à la magistrature suprême ». Il ne doit donc la validation de sa candidature qu’à la complaisance des médecins pourtant assermentés par la Cour constitutionnelle qui lui ont « établi un diagnostic biaisé » selon le journal.

Il parait affaibli dans ses apparitions en public et tient des propos qui frisent l’hallucination. Lors de sa dernière visite de campagne anticipée à Lekana, dans la préfecture des Plateaux, effectuée évidemment en violation de la législation électorale, il a confessé publiquement avoir dialogué avec un mort, le feu Charles Ganao, illustre figure de la contrée, ancien ministre des Affaires étrangères, lors d’un dépôt de gerbe de fleurs sur sa tombe. Il y a lieu de craindre qu’il ne souffre d’une autre maladie non encore diagnostiquée mais dont la gravité pourrait imminemment affecter sa capacité à gouverner et nécessiterait de ce fait son remplacement à la tête de l’Etat. Les Congolais doivent exiger la transparence sur la question et en tirer les conséquences nécessaires. Il est temps de le dispenser de la charge présidentielle qui est particulièrement éprouvante.

Le Président-candidat est sensiblement affecté par l’usure du pouvoir. Après une quarantaine d’année au pouvoir, il a testé l’essentiel des méthodes arbitraires de gouvernement qui ont montré leurs limites. Toutes les stratégies qu’il a jusque-là utilisées pour se maintenir au pouvoir, à savoir la terreur, le tribalisme et la corruption se sont avérées aussi anachroniques qu’inefficaces. La terreur n’est plus fonctionnelle comme jadis après les horreurs du génocide du Pool condamnées par toute la population. Toutes les tentatives de violences et de barbaries intentées tanôt font l’objet de sévères condamnations populaires médiatisées par les réseaux sociaux les vouant prématurément à l’échec. La tentative de putsch imputée aux anciens miliciens ninjas-nsilulus Pablo et Indien, la profanation de la mission catholique de Linzolo, la fusillade de Mayama, la tentative d’assassinat des membres de la famille du porte-parole de la Conférence épiscopale, Monseigneur Abagna-Mossa, à la suite de la déclaration des évêques, sont des faits révélateurs de l’échec de cette stratégie. Le peuple tout entier a condamné ces violences gratuites visant la création d’un climat d’insécurité propice à la conservation de son pouvoir par la terreur.

Le tribalisme qui a longtemps été un instrument efficace de manipulation de l’opinion s’avère désormais inopérant après un bond spectaculaire des Congolais dans l’épanouissement des consciences. Les différentes communautés linguistiques et culturelles de notre pays n’ont ni handicap fonctionnel, ni antipathie congénitale réciproque susceptibles de faire obstacle à l’entretien de rapports de voisinage harmonieux ou à la création d’un environnement social où il fait un bon vivre ensemble. La fameuse théorie des Bakongo revanchards qui délogeraient les Bangala de Brazzaville l’après-midi d’une même journée s’ils récupéraient le pouvoir un matin s’avère être un slogan démagogique d’incitation à la haine des communautés dont la caste dirigeante seule tire profit. L’agitation du spectre des conflits tribaux du genre « la plaie de 1959 ne guérit jamais » est un cri de guerre démodé qui ne résonne plus pareillement qu’auparavant.

Ce slogan ne fait plus écho dans les communautés de la partie nord du pays dont la majorité éclairée a compris la supercherie et la manipulation dont ils sont victimes ; en témoignent les cris d’alarme qui expriment à la fois colère et revendications des ressortissants de ces régions dénonçant les injustices économiques et sociopolitiques subis en permanence sous la gouvernance de l’oligarchie sassoviste. La réalité sociale d’aujourd’hui prouve suffisamment que le tribalisme n’a pas de couleur pour n’en plus douter sinon tous les ressortissants du Nord auraient, présentement un niveau de vie confortable et supérieur à celui de leurs concitoyens du Sud.

En réalité, le despotisme du PCT ne choisit pas toujours ses victimes par affinités tribales comme présumé. Une rétrospective des crimes du système révèle clairement que sous les présidences du candidat Sassou-Nguesso, il a été fait bien des victimes parmi les ressortissants du Nord aussi. Pierre Anga, François-Xavier Katali, Auxence Ikonga entre 1979 et 1992 d’une part et Marcel Ntsourou, Blaise Adoua, Daniel Avoukou et Yves Motando depuis 1997 d’autre part pour ne citer que ceux-là étaient bien des ressortissants du Nord. Dans la guerre du Pool, un bon nombre de victimes en uniforme morts au combat étaient aussi des originaires du Nord.Il convient, dès lors, d’abandonner des logiques irrationnelles qui nous induisent en erreur et de renouer avec des repères édifiants pour le sauvetage de notre nation en péril. Les tandems Youlou-Opango, Kolela-Lethembet-Ambili, Lissouba-Yhombi-Opangaut, Diwarara-Ikoko et autres sont des échantillons sociologiques de concorde nationale suffisamment parlants pour démanteler ce schéma de pensée archaïque qui ne tient point compte des vertus de la conscience humaine susceptible de transcender les clivages socioculturels pour assurer le triomphe de la cohésion sur la division.

Le pays traverse une crise économique sans précédent qui a raréfié les finances. Le régime se retrouve cette fois-ci dépourvu des moyens qui lui permettent habituellement de corrompre les consciences. L’économie, presqu’exclusivement dépendante des hydrocarbures, est sévèrement affectée par la crise de ce secteur et son corollaire, la chute des prix du baril de pétrole. Les compagnies pétrolières n’assurent plus au gouvernement le préfinancement habituel des dépenses publiques. Le pétrolier Total rechigne à verser au régime Sassou la somme de six cent millions de dollars exigée pour le renouvellement du contrat d’exploitation du terminal pétrolier de Ndjeno. Le bois ne rapporte rien à l’Etat en dépit de l’exploitation intensive de nos ressources forestières car ses revenus se volatilisent dans des circuits mafieux qui alimentent des comptes privés des dignitaires de l’oligarchie sassoviste dans des paradis fiscaux. Il n’y a plus de sociétés étatiques viables pour alimenter les caisses publiques. L’Etat manque d’argent tandis que les dignitaires du régime détiennent des fortunes colossales cachées dans des banques étrangères.

Sur le plan diplomatique, le Congo a pratiquement perdu ses lettres de noblesse. La mauvaise gestion des ressources publiques par le gouvernement de Sassou-Nguesso et son incapacité à gérer rationnellement la dette extérieure a rendu le pays insolvable et lui a ôté tout crédit à l’égard des institutions financières internationales comme le FMI et la Banque mondiale. La corruption des dirigeants et les scandales des biens mal acquis qui alimentent bien des procès devant les tribunaux étrangers et font la une des journaux occidentaux ternissent l’image diplomatique du pays. La violation des droits humains à l’instar de l’emprisonnement des opposants politiques dont Jean-Marie Michel Mokoko et André Okombi-Salissa puis des membres de la presse comme Raymond Malonga, directeur de publication de l’hebdomadaire satirique « Sel-Piment », pour délit d’opinion et l’interminable guerre du Pool ont ruiné le crédit du pouvoir de Sassou-Nguesso. Sacer-Info a dévoilé « une indiscrétion de l’ambassadeur de France qui [en] dit long sur la position réelle de son pays sur la politique du Congo ». «Le Congo n’a pas d’ennemis identifié ni identifiable, et pourtant on parle sans cesse de la paix. Qui donc menace la paix au Congo ? Je m’interroge», a renchéri l’ambassadeur de France au Congo au cours d’une rencontre privée avec d’autres diplomates européens ». Inquiet de l’état de santé de Sassou-Nguesso, dans les chancelleries « on s’active alors pour créer un climat propice à sa chute dans un schéma de discrédit diplomatique avant [que] les événements ne s’enchaînent », a dit le journal.

Ce tableau dépeint un président-candidat ruiné, discrédité, languissant et ployant sous le fardeau de son bilan catastrophique dont il manque d’arguments pour sa défense. Sassou-Nguesso ne désormais ni tromper, ni convaincre un seul Congolais digne, conscient de son sort individuel et de celui de sa nation totalement déchirée et menacée d’éclatement. En témoigne la vacuité de ses discours de campagne qui démontre spectaculairement que l’homme n’a plus rien à proposer au peuple sinon raconter des balivernes. A titre d’illustration, à Lekana, il a divagué complètement jusqu’à relater son dialogue avec les esprits sans intérêt ni pour son auditoire local, ni pour la nation. Cependant, le peuple peut fortuitement se contenter de ces dérapages malencontreux de discours superstitieux qui dévoilent la dimension substantiellement métaphysique, mystique et irrationnelle de son pouvoir. C’était moins un discours de campagne électorale qu’un serment rituel d’invocation des esprits faisant penser à un culte traditionnel ou à une cérémonie d’initiation au mysticisme. C’est un discours teinté d’ésotérisme qui foule aux pieds une valeur cardinale de la république : la laïcité et qui consacre manifestement le primat de la logique mystique sur la logique scientifique dans sa gouvernance pour rappeler l’expression chère à Monseigneur Ernest Kombo.

Sur la base de quel bilan, Sassou-Nguesso, président sortant, va-t-il battre campagne ? Il a tout détruit et n’a rien construit de durable. Tous ses chantiers sont des scandales technologiques et financiers dont le peuple ne découvrira la vérité et la gravité qu’après son départ. La route de la corniche, les « Trous de Bouya » et l’université DSN à Brazzaville, la route Sembe-Souanke dans la Sangha, le barrage d’Imboulou dans les Plateaux, etc en sont des preuves tangibles. Pour corroborer sa perversité, il persiste dans l’achat des armes dans l’optique de mater la population en cas de contestation des résultats des élections. L’ironie du sort est l’escroquerie de cent cinquante millions d’euros, soit cent milliards de francs CFA, dont il est victime de la part d’un trafiquant d’armes turc dans une opération d’achat d’hélicoptères de combat alors que tel montant aurait servi à couvrir des dépenses essentielles en cette période de crise. Il dilapide les restes de fonds de la société pétrolire SNPC pour financer sa campagne.

Devant ces scandales légion qui contribuent à l’aggravation de la crise socioéconomique, les Congolais doivent prendre la ferme résolution de destituer cette oligarchie absolutiste pour arrêter la gabegie financière et garantir le salut de la nation. Une alternance s’impose et elle est possible par le jeu démocratique à travers son volet élection. Sassou-Nguesso n’est pas invincible. Dans les circonstances actuelles, il ne peut gagner aucune élection parce qu’il est en déficit cruelle de légitimité. S’il avait 8% de scrutin en 2016, il n’a rien fait tout le long de son mandant finissant pour améliorer ce score ; bien au contraire, il a œuvré pour saper davantage sa légitimité avec toute sa légion de scandales. Il serait chanceux de gagner 3% de suffrages le 21 dans ce climat de grogne populaire. Les Congolais doivent saisir cette opportunité pour le destituer en se mobilisant pour le scrutin. Ils doivent, à cette fin, se lever tous pour voter massivement contre Sassou Nguesso et il sera démis dès le premier tour. Qu’ils fassent fi de leurs convictions idéologiques et votent pour le candidat qui est le plus susceptible de le battre. Qu’ils retrouvent leur civisme perdu pour se prononcer radicalement sur leur avenir à cette échéance électorale qui présage un changement positif certain contrairement au pessimisme véhiculé par la propagande meurtrière du PCT.

David NTOYO-MASEMBO

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